Stop… ou quand la presse illustrée parisienne se moquait de la Bretagne et des Bretons !!!

image_pdfimage_print
STOP (Louis Pierre Gabriel Bernard MOREL-RETZ, dit :), 1877. “La Bretagne et les Bretons / Étude pittoresque par Stop”. Illustration de presse, publiée dans : Le Journal amusant. Journal illustré. Journal d’images, journal comique, critique, satirique, etc., n° 1103, 20 octobre 1877 (30ème année).- Couverture.

STOP fut un des grands caricaturistes de la fin du Second Empire et de la Troisième République… Effectivement, difficile de faire moins caricatural que ce « La Bretagne et les Bretons, étude pittoresque » qu’il publie dans le Journal amusant du 20 octobre 1877 (n° 1103). Ici, menhirs et dolmens sont convoqués pour planter un décor, à la fois pittoresque (c’était indiqué dans le titre), mais encore très archaïsant voire assez méprisant !

On dit «Qui aime bien châtie bien ! » C’est loin d’être le cas ici. Ces six pages d’humour grinçant et de moqueries lourdes cachent mal le profond sentiment anti-breton qui submergea les quartiers populaires parisiens, voir certains milieux lettrés, à la fin du 19ème siècle… Ce racisme, n’ayons pas peur du mot, déboucha sur ce que l’on appela des « bretonnades », des actions violentes et organisées contre les Bretons de Paris, par exemple dans le faubourg Saint-Antoine ou dans le 14ème arrondissement.

Le romancier et essayiste Didier Daeninckx s’en fait l’écho dans un roman publié en 1995 : Nazis dans le métro (page 17) : « Au début il ne parlait pas un mot de français et le samedi soir, après le turbin, l’ouvrier parisien se décontractait les méninges en faisant la chasse aux « étrangers »… Cassage de gueule systématique… Et tu sais comment ils appelaient ça, ces connards ? — Non. D’une pichenette experte Alaric propulsa son mégot dans l’eau claire du caniveau. — Des bretonnades ! Tu te rends compte ? Des bretonnades, quarante ans avant les ratonnades… ».

Sous le pseudonyme de Stop, se cache Louis Pierre Gabriel Bernard Morel-Retz (1825-1899), artiste peintre, musicien, écrivain et caricaturiste bourguignon.

Malgré sa passion artistique, fils du vice-président du tribunal de Dijon, il s’incline devant la volonté paternelle et fait son droit à l’université de sa ville, tout en suivant les cours de peinture de Jean-Marie Heynemans (1811-1890). Diplômé en 1845, il travaille dans un cabinet d’avocats, puis devenu docteur en droit en 1849, il monte en 1850 à la capitale pour travailler à la Cour de cassation puis au Conseil d’État.

Mais la chose juridique n’est pas sa grande passion. Il a une âme d’artiste. Dans sa jeunesse dijonnaise, il a joué du piano sans l’avoir appris, a fait partie d’un groupe de férus de concerts philharmoniques, a écrit les textes de plusieurs opérettes ou saynètes, a peint des aquarelles et a participé à l’exposition de 1849 et a commencé à brosser quelques caricatures.

À Paris, il suit les cours des Beaux-Arts, dans la classe de Charles Gleyre, et il commence une carrière classique de peintre de guerre, de portraitiste, aquarelliste et graveur. Il expose au Salon de 1857, puis de 1864 et 1865. Il écrit par ailleurs deux volumes de fables en vers qu’il illustre lui-même. Une de ces pièces musicales, intitulée Le Sicilien ou l’Amour peintre sera programmée à l’Opéra-Comique, mais la salle Favart brûle le 25 mai 1887 faisant quatre-vingts morts. Les répétitions sont interrompues.

C’est finalement sous le pseudonyme de STOP (le nom de son chien !), qu’il se fait remarquer comme caricaturiste et rencontre la célébrité. L’époque de la fin du Second Empire et de la IIIe République y est propice. Il fait de la caricature sa principale activité, employant son talent de manière variée : journaux humoristiques tels que Le Charivari ou le Journal amusant, sur des couvertures de partitions musicales comme celle de La Symphonie de l’avenir où il ridiculise Wagner. Il produit aussi de nombreuses illustrations et pastiches de tableaux exposés au Salon.

Cyrille CHAIGNEAU pour Les Vaisseaux de Pierre

Pour citer cet article : Chaigneau C., “STOP, ou quand la presse illlustrée parisienne se moquait des Bretons !!!”. In : Les Vaisseaux de Pierres. Exploration des imaginaires autour et sur les mégalithes de Carnac et d’ailleurs, mis en ligne le 23 janvier 2023.- https://lesvaisseauxdepierres-carnac.fr/, consulté le : .

Laisser un commentaire