Henri Martin : historien, homme politique et protecteur des mégalithes

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Les monuments néolithiques de la région de Carnac ne seraient peut-être jamais arrivés jusqu’à nous sans la volonté d’Henri Martin (1810-1883) d’en faire assurer la protection par l’État. Promis au métier de notaire, Henri Martin préfère devenir historien. Son Histoire de France participe à la création d’un récit national utilisé par la IIIe République pour asseoir sa légitimité.

Pour lui, les mégalithes, ces témoins d’un peuple « toujours-déjà-là » pour reprendre la belle expression d’Étienne Bourdon1, font partie intégrante des origines de la Nation et pour les protéger il fait créer en 1879 une commission chargée de désigner ceux qui seront classés au titre des Monuments Historiques. Président de cette commission il procède en 1882 à l’achat des premiers monuments mégalithiques pour l’État, mais meurt en 1883. L’année 1889 couronnera son action avec le classement « par liste » au titre des Monuments Historiques de plus de 200 monuments mégalithiques en France. Célébré de son vivant, il tombe ensuite rapidement dans l’oubli. Nous avons cherché à déterminer sa contribution à la protection des monuments carnacois et à en comprendre les motivations.

1 – Un historien prolifique

La carrière littéraire d’Henri Martin commence de 1830 à 1833 avec quelques romans, et des articles dans des revues littéraires et des magazines2. En 1833, à 23 ans il commence la rédaction de son premier ouvrage sur l’Histoire de France. Celui-ci va connaitre quatre éditions et se vendre à des centaines de milliers d’exemplaires.

  • Le titre de la première édition est « Histoire de France depuis les temps les plus reculés jusqu’en Juillet 1820, par les principaux historiens » Il devait y avoir 48 volumes. Seul le premier volume « Histoire des gaulois » paru3. Paris Mame, 1833 au format in-18.
  • La deuxième édition passe au format in-8, pour réduire le nombre des volumes. Le premier volume « Histoire des Gaulois » est réimprimé dans ce format pour ouvrir cette deuxième édition. Elle est publiée chez le même éditeur sous le titre « Histoire de France depuis les temps les plus reculés jusqu’en Juillet 1830 ». Malgré le titre, elle s’arrête en fait à 1789. Paris, Mame de 1834 à 1836, avec 16 tomes en 8 volumes in-8.
  • Une troisième édition est donnée au public, Histoire de France depuis les temps les plus reculés jusqu’en 1789, nouvelle édition revue et augmentée d’un nouveau travail sur les origines nationales, chez un nouvel éditeur, Paris, Furne, de 1838 à 1853 19 volumes in-8. En 1844 il obtient Le grand prix Gobert4.
  • La quatrième édition porte le titre de Histoire de France depuis les temps les plus reculés jusqu’en 1789, quatrième édition. Il remania son œuvre, la mit au courant des découvertes faites sur les, antiquités celtiques, question qu’il connaît si bien et qu’il a si considérablement agrandie…, tout fut refondu et constitua pour ainsi dire une œuvre nouvelle »5 ; Paris, Furne, de 1855 à 1860, 16 volumes in-8

A partir de 1867, Henri Martin rédige une Histoire populaire de la France abondamment illustrée et moitié plus courte que son Histoire de France, prévue pour paraitre de 1867 à 1885, chez Furne, Jouvet et Cie, à Paris, en 350 livraisons formant 35 séries et 7 volumes.

En 1872 il publie Études d’archéologie celtique. Notes de voyages dans les pays celtiques et scandinaves. C’est un recueil de mémoires et de textes rédigés de 1861 à 1869. Son article de 1864 « Antiquités Bretonnes », où il parle abondamment des mégalithes, lui sert de chapitre IV. Son article polémique sur l’origine des mégalithes lui sert de chapitre VI (Paris, Librairie Académique Henri Martin Didier et Cie. 1872. 1 volume in-8).

A partir de 1878, il complète son Histoire de France avec un dernier ouvrage où il traite des périodes plus proches : Histoire de France depuis 1789 jusqu’à nos jours (Paris, Furne Jouve et Cie, de 1878 à 1885, 8 volumes).

Son Histoire de France est « l’un des plus grands succès de librairie du XIXéme siècle »6, Le dernier ouvrage : Histoire de France depuis 1789 jusqu’à nos jours a été par exemple éditée entre 13 000 et 15 000 exemplaires7.

2 – Origine de la nation, druidisme et archéologie mégalithique

En 1850, la République fait toujours face à une forte opposition monarchiste. Henri Martin va, avec beaucoup d’autres historiens de son temps, s’appuyer sur les Gaulois et les Celtes pour créer une origine de la Nation Républicaine Française plus ancienne et donc plus légitime que celle de la monarchie qui, même si elle s’intéresse à l’histoire grecque et romaine, ne fait remonter les origines du pouvoir royal qu’aux Francs.

Dans la 1ère moitié du 19ème siècle, ce courant de pensée, appelé celtisme par les historiographes, séduit nombre d’érudits à l’instar d’Henri Martin qui pare les Gaulois des plus grandes vertus. Dans son Histoire de France, couronnée à trois reprises par l’Institut8, et que Pierre Larousse célèbre comme « l’une des œuvres les plus consciencieuses de l’érudition contemporaine »9, les Gaulois, « nos véritables ancêtres », sont présentés comme une « brillante race »10. Henri Martin s’inscrit dans la tradition d’un Jules Michelet qui n’hésitait pas à affirmer en 1834 qu’il « y a une telle vertu dans le génie celtique, une telle puissance de vie en ces races, qu’elles durent sous l’outrage, et gardent leur valeur et leur langue »11.

Chaque nouvelle édition de son Histoire de France, va lui permettre de revoir et d’augmenter le traitement du sujet, d’en faire un argument politique et un argument de vente, puisqu’il l’indique en gras, sur la première page de la 3éme édition, au même titre que le Prix Gobert.

Les mégalithes font partie des origines nationales de la France et ils légitiment la République. C’est une bonne raison de s’y intéresser et de les protéger. La liaison entre « monuments celtiques » et « patrie » apparait très clairement dans un article de 1882 sur Henri Martin.

Avec Michelet, M. Henri Martin a fait les républicains sérieux d’aujourd’hui, ceux qui ont toujours combattu pour la République, et l’aiment pour elle-même et non pas pour eux-mêmes… Quand il parle de la vieille Gaule, quand il décrit des monuments Celtiques, il attache, il passionne ; quand il parle de la patrie il remue profondément son auditoire, il l’émeut jusqu’aux larmes ou jusqu’à l’enthousiasme.12

En 1855, dans la 4éme édition de L’Histoire de France, il traite sur 87 pages (Origines, livres I et II) de La gaule indépendante avant l’arrivée des Romains, période qu’il cale entre 1600 et 300 avant e.-c. Il décrit les « Gaulois, nos ancêtres », et développe avec beaucoup d’imagination leur caractère, leur mode de vie, leur système politique et leur religion. Il est prolixe sur les druides et les druidesses, mais ne consacre que quatre pages aux « pierres druidiques » (p. 48 à 52). Sans aucune illustration, ces quatre pages ont sans doute peu d’impact sur les lecteurs.

En 1861, la mort de son fils, âgé de moins de trente ans, le touche fortement.

Ce coup fut rude pour l’âme d’Henri Martin. Il laisse entendre dans un passage de ses « Mélanges d’archéologie celtique » que ce deuil qui le frappa contribua à le jeter dans la carrière des voyages et des recherches archéologiques. En effet, l’activité littéraire de Henri Martin prend, à partir de cette époque, une direction nouvelle. Le grand travail de l’Histoire de France était achevé dans son ensemble. … Son érudition, Henri Martin résolut de l’appliquer toute entière à la recherche de nos antiquités nationales.13

L’immortalité de l’âme, la vie après la mort, deviennent des thèmes importants pour lui, et, d’après certains auteurs, il pense trouver des réponses dans le druidisme.

Henri Martin suivait la pente naturelle de tout esprit investigateur, heureux de pénétrer de plus en plus profondément dans ces arcanes… de notre antiquité préhistorique ; non seulement il était poussé par le devoir de l’historien désireux d’ajouter de nouveaux traits, et des traits parfois décisifs, à la figure du caractère national ; mais il y avait encore en lui une pensée plus élevée, une pensée qu’il avait empruntée à son ami J. Reynaud, une pensée religieuse.

Les deux amis s’étaient toujours plu à imaginer que les mystères de l’antique religion druidique cachaient un fond de doctrines qui n’était pas loin de se trouver d’accord avec leurs propres opinions. Selon Jean Reynaud, les druides avaient une haute conception de l’immortalité de l’âme ; ils avaient, avant lui, déterminé la vaste circulation de la vie, le cercle des voyages accomplis sous des formes diverses par les âmes humaines. Ils avaient établi le libre arbitre absolu de l’homme, le laissant maître de sa destinée présente et future, ils avaient donné, pour but final à ses efforts, l’absorption définitive et délicieuse dans le sein de Dieu. Ces idées influèrent sur toute la carrière historique de Henri Martin. Elles servirent de point de départ à ses études celtiques. Il est aujourd’hui admis, qu’il ne sut pas se dégager assez de ces idées premières et qu’elles ont contribué à fausser quelques-unes de ses appréciations ; qu’elles l’ont amené à donner à certains aperçus, plus ingénieux que fondés, une importance très contestable.14

3 – Les antiquités bretonnes (1864)

Il effectue en 1864 un voyage en Bretagne pour s’informer des derniers résultats des recherches archéologiques sur les mégalithes et publie un compte rendu de ce voyage, dans son recueil de 1872, sous le titre Les antiquités Bretonnes dont nous avons choisi des extraits. Voici tout d’abord comment il présente son voyage.

Les empires lointains, l’Egypte, l’Inde, la Perse, nous livrent leurs secrets ; la vieille Gaule, notre mère, ne doit pas nous être plus inexorable… les monuments de pierre vierge, sont ou paraissent silencieux ; monuments muets, peuples muets, les Gaulois n’ayant pas laissé de livres. On s’efforce aujourd’hui de les obliger à rompre ce silence.

Il y a deux moyens d’élucider la question :

1° étudier ce qui peut se rapporter à ces monuments, d’une part, dans les livres des Grecs et des Romains, de l’autre, dans les traditions des peuples qui parlent encore maintenant les dialectes celtiques et dont les écrits peuvent suppléer jusqu’à un certain point à l’absence de documents gaulois antérieurs à l’ère chrétienne.

2° étudier directement en eux-mêmes les monuments de pierre vierge, moins muets peut-être qu’on ne l’imagine.

Visiter de nouveau la Bretagne eût été nécessaire en toute circonstance, l’archéologie bretonne se renouvelant et se développant à vue d’œil par les résultats progressifs du système de fouilles poursuivi dans ces dernières années avec une activité et une habileté croissante. Au lieu d’ouvrir, comme autrefois au hasard, à de longs intervalles et sans les précautions et les constatations nécessaires, tel ou tel tumulus isolé, des hommes, dont l’expérience et la capacité égalent le zèle, exécutent actuellement, parmi les monuments du Morbihan, le principal centre de cette antique architecture, une exploration combinée et conduite avec une rigueur et une précision scientifique sans exemple jusqu’ici. Comme point de départ de toute étude ultérieure, je n’avais rien de mieux à faire que de visiter sous leurs auspices l’ensemble de leurs travaux et de leurs découvertes, dont une partie seulement était arrivée à ma connaissance. Je partis donc.

La grande nécropole du Morbihan 

Il va visiter ce qu’il appelle « La grande nécropole du Morbihan » (p. 168). Il note que ce n’est pas son premier voyage dans la région puisqu’il va visiter des monuments qu’il avait vu « autrefois ». Son voyage est bien organisé et il est accompagné par les meilleurs spécialistes de la société Polymathique de Vannes. Son ami M. de la Villemarqué, l’a mis en rapport avec le directeur des fouilles, M. René Galles. Il rencontre M. de Cussé, en charge des moulages, M. de Limur, géologue en charge de la détermination et l’origine des roches des monuments, M. Lallemand, très-versé dans l’histoire et la légende de l’antique Vénétie armoricaine, et M. de Keranflech, archéologue « bien connu par ses excellents travaux sur les antiquités bretonnes ».

Il décrit « la grande nécropole du Morbihan » qui débute à Plouhinec, se poursuit sur Erdeven et Plouharnel, se divise vers Quiberon, continue vers Carnac, Crach et Locmariaquer, passe à Gavrinis et finit à Tumiac. Son compte rendu résume les connaissances des spécialistes locaux qui l’accompagnent, notamment ceux qui vont dans son sens. Dans un paragraphe, il nous livre les premières lignes montrant son intérêt pour la préservation de ces monuments :

« C’est là l’ensemble de ce qu’on nomme les alignements de Carnac, du nom du bourg le plus voisin. Il restait, dit-on, il y a une vingtaine d’années, environ 1,900 menhirs, tant debout qu’abattus, et il ne parait pas que le nombre ait sensiblement diminué depuis. Si les ponts et chaussées voulaient bien ne pas se montrer plus redoutables aux monuments de Carnac que les habitants des campagnes, nous pourrions espérer les conserver assez longtemps encore ; mais ces monuments, sans rivaux dans leur genre, méritent mieux que de subsister provisoirement par tolérance ; ils valent bien que l’État les prenne sous sa protection directe, et il n’est assurément, parmi les monuments classés comme nationaux, rien qui les surpasse en importance historique. »

Et il rajoute une note écrite en 1872 :

« Depuis 1864, rien n’a encore été fait pour assurer le salut des monuments de Carnac, et l’on nous a signalé de nouveaux actes de vandalisme. »

Les Ages primitifs. — Les autels. — La lande de Trégunc (p. 189)

Pour comprendre cette partie il n’est pas inutile de rappeler le contexte des connaissances de l’époque. Alexandre Bertrand, archéologue, directeur de la Revue Archéologique à partir de 1863, président de la Société Anthropologique de Paris en 1864 indiquait dans son mémoire primé de 1862, que les hypothèses suivantes étaient « à combattre » :

  • les pierres branlantes font partie des monuments celtiques ;
  • les pierres à bassins sont des pierres à sacrifices ;
  • les dolmens sont des autels où l’on a sacrifié des victimes humaines.

Henri Martin fait fi de cet avertissement et se laisse entrainer dans ses théories druidiques. Il part, guidé par Mr Hersart de la Villemarqué à la recherche des « antiquités primordiales » dans la lande de Trégunc en Finistère.

« Deux objets nous préoccupaient, M. de la Villemarqué et moi : visiter les lieux d’où l’on avait tiré les grands matériaux des monuments du Morbihan, et où nous avions chance de rencontrer des antiquités tout à fait primordiales, puis rechercher des autels druidiques présentant des indices suffisants de leur origine… Nous nous dirigeâmes vers les vastes landes qui s’étendent de Pont-Aven à Concarneau. »

Le territoire de Trégunc est jonché de blocs granitiques massifs aux formes arrondies résultat de l’érosion particulière du granite. Les archéologues de la première moitié du 19ème siècle – les antiquaires tel qu’on les appelle alors – en ont fait des monuments celtiques15. Deux formations naturelles sont par exemple présentées en 1847 dans l’ouvrage du Baron Taylor : l’une comme le « Grand Dolmen de Trégunc » et l’autre comme les « Cimetière druidique et cromlech de Trégunc ».

Mais comme on l’a vu, dès 1862, des voix s’élevaient pour les faire reconnaitre comme des pierres simplement posées par la nature. Malgré cela l’Inventaire des monuments mégalithiques de 1880 que Henri Martin supervise en tant que président de la sous-commission porte une colonne « pierres branlantes » où on retrouve celle de Trégunc16.

Rappelons qu’une des théories d’Henri Martin est que ce n’est pas par défaut de moyens techniques, mais par choix religieux, que les constructeurs mégalithiques ont (comme les Hébreux) construit en pierre vierge, c’est-à-dire non travaillée de main d’homme.

Il visite les deux grands menhirs de Trégunc, puis certaines grottes, amas de pierres et roches branlantes où il devine des autels druidiques et des pierres de vérité. Pour lui ce sont des monuments primitifs antérieurs à Carnac.

« C’était bien un dol-men dans le sens étymologique, une table de pierre, et nous n’en avions jamais vu de si belle. La table monolithe avait bien dix mètres de long et une largeur proportionnelle ; mais elle ne formait pas le toit d’une chambre funéraire : elle était simplement posée sur une autre masse allongée. (…) Deux blocs étaient couchés à droite et à gauche de la table ; on montait sur ces blocs, puis de là, on mettait le pied dans les cavités pour gravir sur la table, où pouvait se tenir un groupe de prêtres en vue d’une nombreuse assistance (…) Ce monument n’avait jamais dû être, comme les dolmens funéraires, engagé sous un tumulus : le paysan kavenote qui nous y avait menés l’appelait « an aoler », l’autel, et nous restâmes persuadés que le paysan avait raison, ce qui arrive souvent, pour ces sortes de choses, dans ce pays traditionnel par excellence. C’était, je le crois, le premier autel druidique que je n’eusse jamais vu. »

Pour lui, les « pierres branlantes » et « pierres tremblantes », de Trégunc et d’ailleurs, ne peuvent être des constructions naturelles, et sont donc des vestiges druidiques.

« Près de la route de Concarneau apparaît une de ces fameuses pierres branlantes qui ont donné lieu à tant de débats et qui sont devenues assez rares. C’est un bloc énorme posé tout simplement en équilibre sur le sol. En le touchant à un certain point de l’une ou l’autre de ses extrémités, un enfant le fait osciller sans peine : en toute autre manière, un géant ne l’ébranlerait pas.

Faut-il voir là l’emblème du libre arbitre, de ce point de liberté ou point d’équilibre qui définit la vie humaine (état d’humanité) chez les bardes, grands ennemis du fatalisme ? Quoi qu’il en soit de cette interprétation métaphysique, les traditions qui se rattachent presque partout aux pierres branlantes indiquent qu’elles avaient un emploi tout pratique dans les coutumes des Gaulois, et qu’elles servaient à des épreuves judiciaires. Les accusés qui ne parvenaient pas à mettre en mouvement la pierre étaient sans doute réputés coupables. »

Il conclut en affirmant que les monuments mégalithiques de Carnac ont été construit à partir de blocs provenant de Trégunc (65 km à vol d’oiseau, 90 km en évitant à peu près mer et rivières).

« C’est d’ici que leurs successeurs ont charrié à Carnac et à Locmariaker les pierres géantes traînées par des milliers d’hommes. Malheureusement la carrière des druides a recommencé d’être carrière pour des constructions moins solennelles ; quelques monuments seront préservés sans doute, mais ceux qui voudront voir les blocs de Trégunc dans un ensemble imposant encore feront bien de ne pas trop différer le voyage. »

Cette vision poétique est éminemment touristique. En 1900, les cartes postales de Trégunc mettent toujours en avant roches tremblantes et branlantes et continuent de qualifier de « Grand Dolmen » et de « Pierre à Sacrifice » ces formations naturelles.

4 – Henri Martin, membre de la Société d’Anthropologie de Paris (1864- 1883)

Henri Martin rentre à la Société Anthropologique de Paris le 4 février 1864. Il en fera partie jusqu’à sa mort et en assumera la présidence en 1878. La société d’anthropologie est la plus ancienne du monde à porter ce nom. A cette époque elle s’occupe non seulement d’anthropologie au sens que nous lui donnons aujourd’hui mais aussi de préhistoire et d’ethnographie. Jacques Boucher de Crèvecoeur de Perthes (1788-1868) y entre en 1860, Gabriel de Mortillet (1821-1898) en 1866. La société est parfois le reflet des préjugés de son temps, la classification en race y est très utilisée, mais c’est un lieu d’échange entre scientifiques qui permet toujours à la vérité de faire son chemin. Paul Broca (1824-1880), un des pères de l’anthropologie moderne et sénateur de la gauche républicaine, en sera le Secrétaire Général jusqu’à sa mort.

La société permettra à Henri Martin de partager ses opinions et ses recherches avec ses pairs. Les membres sont souvent des spécialistes reconnus, les discussions y sont passionnées mais courtoises. Henri Martin a une activité professionnelle déjà bien chargée et se désole de ne pas pouvoir être suffisamment présent aux séances de la Société qui ont lieu deux fois par mois. Le bulletin de la SAP indique qu’il intervient 31 fois dans des discussions entre 1864 et 1883, et qu’il fait 13 interventions. Huit interventions sont sur les populations Celtes et Aryas ou en rapport. Trois interventions sont d’ordre général : discours d’entrée comme président, de sortie, et éloge funèbre de Mr Broca. Deux interventions ont pour objet les monuments mégalithiques ; nous les développerons dans les chapitres 5 et 8.

5 – Les mégalithes ont-ils été construits par les Celtes ? Controverse avec Alexandre Bertrand (1867)

Henri Martin, envoie une lettre à la SAP « Sur les monuments mégalithiques et la race qui les a construits » qui sera lue lors de la séance du 7 mars 1867. Il indique qu’il pense que ce sont les Celtes qui sont à l’origine des mégalithes en France. Alexandre Bertrand (1820-1902) rejette, en séance, cette affirmation de manière argumentée.

Alexandre Bertrand a obtenu en 1862 le prix de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettre pour son mémoire « Les monuments Primitifs de la Gaule, monuments dits Celtiques, Dolmens et Tumulus ». Dans les hypothèses à combattre, la première qu’il rejette est celle que « Les menhirs, dolmens, tumulus, cromlechs sont des monuments élevés par les Celtes ». Son argumentation est simple : les objets en Bronze et la poterie fine sont caractéristiques des celtes, or on ne trouve que des outils en pierre et de la poterie frustre dans les dolmens préservés. De plus la répartition des Dolmens en France montre qu’ils sont centrés sur la façade maritime Ouest de la France entre les embouchures de l’Orne jusqu’à l’embouchure de la Gironde, ce qui n’est pas cohérent avec le territoire des celtes. La population qui a construit ces monuments est donc beaucoup plus ancienne que les Celtes. Les romains n’ont pas pu la croiser, ou rencontrer des populations qui l’ont croisée ou en auraient conservé des traditions. On ne peut donc l’appréhender qu’à travers l’archéologie. Son mémoire est publié dans la Revue archéologique, dont il est le directeur, au premier semestre 186317.

Henri Martin, après sa lettre du 7 mars 1867, présente le 16 octobre 1867 une communication sur « l’origine des monuments mégalithiques », au premier Congrès International Celtique à Saint-Brieuc18.  Il continue de prétendre que les monuments mégalithiques sont construits par les Celtes. Alexandre Bertrand publie ce mémoire en décembre 1867 dans la Revue Archéologique et indique courtoisement en préambule :

« (Henri Martin) est de ceux qui continuent à voir dans ces antiques, et grossiers monuments une œuvre des Celtes. Cette opinion, autrefois dominante, mais fortement battue en brèche depuis plusieurs années, il la reprend avec l’habileté d’argumentation et la chaleur de conviction qu’il apporte dans tout ce qu’il fait. (…) Il nous a paru que réponse pouvait être faite à tous les arguments de M. Henri Martin, et qu’il serait bon de le dire… Nous donnerons d’abord in extenso le mémoire de Mr Henri Martin afin de ne diminuer en rien la force de ses arguments, nous développerons ensuite librement les nôtres. Le public jugera. Nous pensons, en tout cas, que la vérité ne peut que gagner à cette lutte entre deux opinions également sincères et réfléchies. »19

Alexandre Bertrand fera paraitre en février 1868 le mémoire de Théodore Hersard de la Villemarqué (1815-1895) présenté au même congrès et sur le même sujet, indiquant que sa réponse à Henri Martin vaudrait pour le second.

Mais sa réponse ne paraitra pas dans les numéros suivant de la revue. Peut-être décide-t-il qu’une réponse n’est pas nécessaire puisqu’il y a déjà répondu dans son mémoire de 1862, que la position d’Henri Martin est un combat d’arrière-garde et qu’il est inutile de tirer sur l’ambulance. Peut-être est-ce aussi par respect pour le personnage.

Henri Martin ne se démonte pas. En 1872 il édite un recueil de ses travaux précédents qu’il intitule « Études d’archéologie Celtique » et reprend intégralement en chapitre 6 son mémoire de 1867 sur l’origine des mégalithes. Alexandre Bertrand édite à son tour un recueil de ses travaux en 1876… et y reprend dans son intégralité son mémoire de 1862.

Si les deux hommes campent sur leurs positions, cela se fait dans la plus grande courtoisie. Pour Henri Martin, leurs différences de point de vue ne sont pas si grandes. S’il admet qu’il y ait eu deux époques, il continue de prétendre qu’il ne s’agit que d’un seul peuple : les Celtes, même s’il l’on observe quelques évolutions et nuances dans le temps : Proto-Celtes, Vieux Celtes, Celtes et Gaulois.

6 – Histoire de France Populaire. Les Origines, 1ère série, livres I et II (1867)


Comme son nom l’indique, cette Histoire de France Populaire ne s’adresse plus à une élite culturelle, mais au « peuple ». Elle sera donc plus courte (8 volumes) plus simple, abondamment illustrée (pour notre plus grand plaisir) et vendue en livraisons. « 1000 gravures, 350 livraisons » clame la première de couverture23.

« L’auteur de ce livre a écrit d’abord l’Histoire de l’ancienne France, dans des proportions étendues, … Il s’adressait alors principalement à ceux de ses concitoyens qui peuvent étudier en détail le passé de la patrie. Aujourd’hui, l’auteur a entrepris d’écrire, dans des limites beaucoup plus restreintes, les fastes de l’ancienne et de la nouvelle France, depuis les origines jusqu’à nos jours. Il s’adresse maintenant à ce nombre beaucoup plus grand de citoyens qui n’ont pas le loisir des longues lectures, mais qui ont le désir et le devoir de connaître le fond essentiel de l’histoire de la patrie. Il leur présente le résultat de, trente-cinq ans de travaux sur ce sujet auquel il a consacré sa vie. Il ne conserve, cette fois, dans le cadre plus resserré de ses récits, que les personnages et les faits qui ont marqué fortement dans le bien ou dans le mal, et qui ont exercé une influence réelle sur les destinées de la France. »

Le publication d’image, par le biais des techniques lithographiques entre autres, va faire le succès de la presse populaire au 19ème siècle24. Elle assurera le même succès à cette Histoire de France Populaire. C’est bien sûr les premiers chapitres qui nous intéressent. Ils traitent des Gaulois avec « Les Origines – Mœurs et coutumes des gaulois. » pour le chapitre 1, et « Victoires et conquêtes des gaulois (de l’an 1500 à 278 avant JC) » pour le chapitre 2. Nous allons dans ce paragraphe présenter les passages qui nous semblent représentatifs et utiliser les gravures qui font le charme et contribuent à l’impact de cet ouvrage.

La description qu’il fait des Gaulois ne nous est pas étrangère. C’est celle qui prévaudra dans tous les manuels scolaires de la IIIe République, matière qui inspirera Uderzo et Goscinny quand il faudra offrir une géographie et des paysages à leurs héros Astérix et Obélix.

« La langue des Gaulois, qu’on nomme celtique parce que les Gaulois étaient aussi appelés Celtes, a subsisté chez les Bas-Bretons, et le caractère des Gaulois a subsisté chez nous tous, comme leur sang a passé de génération en génération jusque dans nos veines. Il y avait en eux beaucoup de choses diverses et contraires. Ils étaient enthousiastes et moqueurs, mobiles en apparence, obstinés au fond, sociables et querelleurs, faciles à vivre et intraitables sur le point d’honneur, généreux et envahissants, cruels à la guerre et sensibles aux plaintes des malheureux, et toujours prêts à secourir le faible contre le fort ; éloquents dans les assemblées, ils aimaient les combats de la parole comme les combats de l’épée, et ils n’avaient aucune peur de la mort.

Leurs femmes étaient de belle apparence et de grand courage, bonnes conseillères de leurs maris, bonnes éducatrices de leurs enfants. On les prenait parfois pour arbitres dans les différends entre les nations. On cite d’elles nombre de traits d’une héroïque fidélité.

Les premiers Gaulois étaient de grands hommes blonds, aux yeux bleus ; mais ils amenèrent avec eux d’Asie d’autres tribus de la famille aryenne qui se firent gauloises, et ils se mêlèrent aussi plus tard avec les restes des populations plus anciennes qu’eux en Occident, surtout avec les Espagnols dans le Midi ; et c’est apparemment à cause de cela que nous sommes aujourd’hui, pour la plupart, moins grands qu’eux, et châtains, et non plus blonds. »

C’est en page 9 qu’il commence à parler des mégalithes en général, et particulièrement de ceux de Carnac et Locmariaquer, sans oublier bien sûr d’aborder les « Pierres branlantes ».

« Les Gaulois, mêlant la religion à toutes choses, offraient les sacrifices, tenaient les conseils de guerre, les cours de justice, les assemblées d’élection, dans des cercles de pierres consacrés, image du monde et du cercle de l’existence qui n’aura point de fin.

Ces cercles étaient situés dans les clairières des forêts de chênes, et on les nommait le Sanctuaire du Chêne. On déposait aussi dans ces cercles les enseignes militaires, qui étaient le sanglier d’airain, le dragon rouge, le taureau, et un animal fantastique appelé cheval marin. C’est là qu’on venait chercher les enseignes, en grande cérémonie, aux jours des dangers publics et des grandes guerres. »

Comme les anciens Persans, les Gaulois croyaient qu’on ne doit point enfermer la Divinité dans des temples ; comme Moïse et les anciens Juifs, ils croyaient qu’on ne doit point élever d’autel ni d’autre monument au Seigneur, sinon avec des pierres que la main de l’homme n’a point taillées.

Et c’est pour cela qu’ils ne nous ont laissé que des monuments de pierre vierge.

Nous avons gardé des Gaulois quelques débris de cercles consacrés et d’autels, quelques avenues de pierres levées, dont les restes immenses étonnent le voyageur sur les grèves de Bretagne, et qui, selon toute apparence, se rapportaient à la religion. A Carnac, dans le Morbihan, non loin de la presqu’île de Quiberon, il subsiste onze lignes de pierres levées, qui partent d’un cercle de très-hautes pierres et qui se prolongent pendant 3 kilomètres. A Erdeven, à peu de distance de Carnac., il y a encore treize autres lignes qu’on peut suivre pendant un quart d’heure. Et il y en avait là autrefois bien davantage. Il en existait aussi, en Périgord et ailleurs, qui ont été détruites.

Nous avons encore quelques autres pierres levées et des buttes qui ont pu marquer les limites des tribus et des nations ; nous avons aussi, mais rarement, une espèce de monument très-extraordinaire : c’est un immense bloc de pierre, posé en équilibre sur une autre roche, de sorte qu’en le touchant sur un certain point, le doigt d’un enfant fait remuer cette prodigieuse masse. Si l’on touche la pierre en tout autre endroit, les bras des géants ne l’ébranleraient pas

Le plus grand nombre, parmi les monuments gaulois qui n’ont pas été détruits par les révolutions des religions et des gouvernements et par le défrichement de la terre, le plus grand nombre, et de beaucoup, sont reconnus aujourd’hui pour être les tombeaux de nos aïeux, soit qu’ils consistent en pierres levées, en grottes à découvert, formées de quelques blocs énormes, ou en monceaux de terre ou de pierres renfermant d’autres grottes ou caveaux funèbres.

Il existe, dans un rayon de 8 ou 10 kilomètres autour des alignements de Carnac, un grand nombre de ces tertres funéraires, les uns encore debout, les autres effondrés. Il semble qu’il y ait eu là comme une ville des morts, et que les druides et les chefs des Gaulois se soient fait inhumer là autour d’un lieu sacré. Anciennement, les tertres funéraires étaient surmontés d’une haute pierre, probablement l’emblème du Dieu suprême, et, d’habitude, entourés d’un ou-de plusieurs cercles de pierres, parce que le cercle, qui est la forme de la terre et du soleil et de tous les mondes, était considéré comme une forme sainte, et mettait les tombeaux sous la protection de la Divinité.

On ne rencontre le plus souvent, quand on les fouille, que des objets en pierre : peut-être faut-il reconnaître encore ici la même pensée religieuse qui portait les Gaulois à ne construire que des monuments de pierre vierge. Quelquefois, cependant, on trouve des armes de bronze, ou des colliers, ou des bracelets d’or, ce qui indique les sépultures de chefs de guerre et non de druides. Parmi les pierres plantées debout auprès des tertres funéraires, il y en avait d’une hauteur prodigieuse et d’un poids énorme. A Loc-Mariaker, à 8 kilomètres de Carnac, on voit à terre, brisé en quatre morceaux, un obélisque de granit d’un seul bloc, aussi long et deux fois plus gros que l’obélisque de la place de la Concorde, à Paris. On n’en voit plus de si grands qui soient restés debout ; cependant, il y a encore, dans la lande de Saint-Renan, à quelques lieues de Brest, une haute pierre, un menhir, comme on dit dans la langue des Bretons, qui s’élève de 12 mètres au-dessus de terre.

C’est des Gaulois que nous vient ce culte des tombeaux et cette fidélité aux trépassés qui distingue encore aujourd’hui les Français parmi les autres peuples. C’est d’après eux, et comme eux, que nous célébrons, le 2 novembre, la Commémoration des morts.

Les tombeaux étaient les vrais temples de ce peuple qui n’avait point de temples. La foi des Gaulois en l’immortalité était telle, qu’ils vivaient, pour ainsi dire, d’avance dans l’autre vie. La mort n’était pour eux qu’un voyage.

7 – Études d’Archéologie Celtique. Notes de Voyages dans les Pays Celtiques et Scandinaves (1872)

Dans la deuxième moitié du 19ème siècle, le celtisme est devenue celtomanie et prend alors un caractère franchement patriotique, voire nationaliste. À ce titre, les Études d’archéologie celtique d’Henri Martin illustrent bien cette relation entre l’écriture historique et l’identité nationale contemporaine. Dans cet ouvrage, au titre alléchant, il compile certains de ses anciens articles rédigés entre 1861 et 1869 lors de voyages au Pays de Galles, en Irlande, en Bretagne et dans les États scandinaves, dont ses Antiquités Bretonnes de 1864 et son article controversé de 1867 sur l’origine des mégalithes dont nous avons parlé précédemment. Les articles sont les suivants :

  • Les Races brunes et les races blondes (1861), p. 1-24
  • Le Pays de Galles. Notes de voyages. (1861), p. 6-62
  • Les Antiquités irlandaise. Notes de voyage (1862), p. 63- 158
  • Les Antiquités bretonnes (1864), p. 159- 208
  • Numismatique gauloise (1866), p. 209- 221
  • De l’Origine des monuments mégalithiques (1867), p. 223-267
  • Sur la Mythologie celtique (1868), p. 69-288
  • Étude sur le Mystère des bardes de l’Ile de Bretagne (1868-1869), p. 289-367
  • Le Nord scandinave. Notes de voyages (1869)

L’ouvrage est achevé à l’été 1870, mais l’entrée en guerre le 19 juillet reporte l’impression de l’ouvrage. Ce n’est qu’en 1872 qu’il paraît. L’historien ajoute alors un addendum à l’« Avis au lecteur » qui précise la nouvelle problématique française des origines gauloises :

L’étude des traditions propres à notre race gauloise nous paraît croître en intérêt par suite de la cruelle lutte internationale engagée entre l’Allemagne et la France. Il y a plus aujourd’hui qu’une curiosité d’érudition, il y a un véritable appui moral à retrouver dans ces documents celtiques inspirés par un esprit si radicalement opposé à la philosophie allemande du XIXe siècle, qui a envahi la France avant les armées allemandes. Comme dans les légendes antiques, nos devanciers se lèvent, du fond du monument de pierre, pour nous venir en aide.26

Non seulement le passé est doté d’une vertu explicative du présent mais, plus encore, les ancêtres viennent au secours des contemporains.

Le livre est décevant. Les théories sont déjà dépassées et le voyage voué à l’échec. Dans « Le Pays de Galles » et « Les Antiquités Irlandaises » il décrit la population, les villes et les campagnes, mais ne fait que survoler les monuments mégalithiques (Stonehenge et Newgrange).

Henri Martin pense trouver dans les populations actuelles des restes de la langue des Celtes, constructeurs de mégalithes. Il s’intéresse aux traditions et aux légendes, aux poésies et aux chants. Un de ses sources, Iolo Morganw, est soupçonné d’être un faussaire27.

Comme l’a indiqué Gabriel Hanotaux, son biographe, Henri Martin veut mettre ses chers Celtes au centre de tout. Dans cet ouvrage, il réfute maladroitement et laborieusement les théories les plus récentes, comme celle de l’antériorité des mégalithes sur la civilisation celtique.

« Des archéologues distingués conclurent de ces observations que la classe de petits tumulus que nous venons de citer étaient les tombeaux des Gaulois, mais que les grands tumulus à dolmens, et, en général, les dolmens couverts et découverts, dans lesquels dominent les armes et objets divers de pierre polie, comme les métaux dominent dans les petits tumulus, avaient été attribués par erreur aux Celtes, et qu’ils appartenaient à une race antérieure et à un autre âge, l’âge de la pierre polie.…Peut-on attribuer les dolmens, en Occident, à un peuple qui ne soit pas les Celtes ? L’histoire, l’archéologie, l’anthropologie peuvent-elles apercevoir en Occident un peuple antérieur aux Celtes ? »

La partie la plus intéressante de l’ouvrage est sans doute le compte rendu de son voyage à Carnac en 1864 et le fait qu’il y indique sa conviction que ces monuments doivent être protégés par l’état. Le recueil ne semble pas avoir été réédité, preuve d’un succès mitigé.

8 – De la présidence de la Société d’Anthropologie de Paris à celle de la sous-commission des monuments mégalithiques (1878-1879)


C’est une grande surprise et une grande joie pour lui d’être élu Président de la Société d’Anthropologie de Paris pour l’année 1878. En effet il n’est ni anthropologue ni archéologue, simplement historien.


Cette nomination va lui permettre, en s’appuyant sur les membres de la SAP, de lancer une demande officielle de protection des mégalithes avec la création d’une sous -commission des monuments mégalithiques au sein de la commission des monuments historiques. Cela se passe lors de la séance du 5 décembre 1878. Il profite de la présentation d’un album photo de Félix Gaillard pour formuler sa proposition. Le fait que le conseil Général des Deux-Sèvres ait récemment racheté et protégé le tumulus de Bougon et que le Conseil Général de Corse « considère comme historiques tous les monuments mégalithiques de son territoire », fini de convaincre l’assemblée. Le compte rendu nous parait historique et nous le partageons en intégralité.

« Sur les monuments mégalithiques du Morbihan. PAR M. H. MARTIN.

M. Henri Martin montre un bel album de photographies représentant les principaux monuments mégalithiques de la commune de Plouharnel (Morbihan). Ces photographies ont été faites par les soins de M. Gaillard, de Plouharnel, qui a dressé en outre la liste de tous les monuments mégalithiques qui existent en si grand nombre dans cette commune. M. Gaillard s’est appliqué à nous indiquer leur emplacement très exactement déterminé, et on outre leurs noms primitifs, qui souvent donnent des renseignements précieux et qui ont été parfois profondément altérés par l’usage. Enfin, M. Gaillard, après avoir dressé la carte de la commune de Plouharnel, si riche en monuments divers, s’occupe à dresser la carte des communes de Carnac et d’Erdeven, dans lesquelles se trouvent les grands alignements. Ce travail est d’autant plus utile, que ces monuments mégalithiques sont encore aujourd’hui très menacés il est temps qu’on avise à leur salut, et M. Gaillard nous fournit des éléments essentiels dans ce but.

M. Henri Martin, en terminant sa précédente communication, appelle l’attention de la Société sur la nécessité de mettre sous la protection de l’État ces monuments qu’en ce moment on mutile chaque jour. Le ministre de l’instruction publique vient de déposer un projet de loi pour la conservation des monuments historiques je pense me mettre en rapport avec la commission chargée de l’examiner pour la déterminer à ranger les monuments mégalithiques parmi les monuments historiques. Je demande à la Société l’autorisation de parler en son nom, afin de donner une plus grande autorité à ma parole.

Quand nous aurons obtenu le classement des monuments mégalithiques parmi les monuments historiques, nous pourrons sans doute aller plus loin dans ta même voie, et demander l’acquisition par l’Etat des trois landes de Carnac, d’Erdeven et de Locmariaker. Ce sont trois plaines sans valeur où on pourrait les conserver et même relever à peu de frais beaucoup des menhirs qui sont renversés. Il est inutile de développer devant la Société tout l’intérêt scientifique qui s’attache à ces monuments remarquables et à leur conservation.

M de Mortillet appuie la motion de M. Henri Martin et demande que la Société formule à ce sujet un vœu. Ces monuments sont les plus anciens que possède la France, et depuis 1840 leur dégradation est effrayante : on peut dire qu’ils tendent chaque jour à disparaître.

M. Lefèvre signale un certain nombre de monuments mégalithiques qui déjà sont classés comme monuments historiques (à Bretteville, Carloville, Martinvast, etc.). C’est un précédent qu’on pourrait invoquer.

M. Zaborowski. Je profite de l’occasion qui m’est offerte par la communication si pleine d’à-propos de M. le sénateur président pour faire connaître l’état des monuments de Bougon et les mesures qui ont été récemment prises pour leur conservation. Ces monuments se composent de deux tumuli coniques, d’un tumulus allongé avec pierre dolménique à l’une des extrémités et de deux tertres allongés…Récemment (1872), le conseil général des Deux-Sèvres, pour les préserver de la destruction, a acheté le terrain sur lequel ils se trouvent. Aujourd’hui ils sont entourés d’une clôture, la « cella » du second tumulus est fermée d’une porte et placée sous la garde d’un habitant du village de Bougon. Cette mesure du conseil général des Deux-Sèvres se recommande à l’attention de la commission dont M. H. Martin vient de nous entretenir.

M. Girard de Rialle. Le fait que signale M. Zaborowski a une grande importance. L’initiative qu’à prise le conseil général des Deux-Sèvres en achetant les terrains sur lesquels se trouvent ses principaux monuments mégalithiques mérite d’être encouragé. L’exemple a déjà été suivi, je crois que c’est par deux autres départements il pourra être imité par d’autres conseils généraux. Je propose à la Société de témoigner la satisfaction qu’elle éprouva en voyant assurer ainsi la conservation de nos vieux monuments. Ce fait est d’autant plus remarquable, qu’à ce sujet la France pourra donner un exemple utile aux autres nations de l’Europe. Vous savez que dernièrement, sir John Lubbock ayant proposé au Parlement anglais une loi pour la conservation des monuments historiques, cette proposition fut rejetée dédaigneusement.

M. Mattet annonce que depuis plusieurs années déjà le conseil général de la Corse a résolu de considérer comme historiques tous les monuments mégalithiques de son territoire.

A la suite des faits exposés par son président, la Société, sur la proposition du bureau, émet à l’unanimité, par deux votes successifs, les deux vœux suivants

Premier Vœux : La Société émet le vœu qu’il soit nommé par le ministre de l’instruction publique une commission chargée de désigner dans toute la France et dans l’Algérie les monumenta mégalithiques qui doivent être classés parmi les monuments historiques.

Deuxième Vœux : La Société émet le vœu que l’Etat fasse l’acquisition des terrains sur lesquels sont situés les monuments mégalithiques de Carnac, Erdeven, Locmariaker.

La Société décide ensuite qu’une lettre de remerciements et de félicitations sera adressée aux conseils généraux des Deux-Sèvres et de la Corse, qui ont pris des mesures pour la conservation des monuments mégalithiques de ces départements.

La séance est levée & six heures.

Ce vœu fut transmis à M. Bardoux, ministre de l’instruction publique, le secrétaire général, dans une lettre qui a été publiée dans le procès-verbal de la séance du 19 décembre 1878.

« A Monsieur le ministre de l’Instruction publique, des cultes et des beaux-arts

Monsieur le ministre,

La Société d’anthropologie, justement préoccupée de la conservation des monuments mégalithiques, si précieux pour notre science et pour notre pays, et menacés pourtant chaque jour par des mains inintelligentes, a été, dans la séance du 5 décembre, à l’unanimité, sur la proposition de son président, le sénateur Henri Martin, le vœu suivant que j’ai l’honneur de vous transmettre

« La Société d’anthropologie émet le vœu qu’il soit nommé par M. le ministre de l’instruction publique une commission chargée de désigner dans toute ta France et dans l’Algérie les monuments mégalithiques qui doivent être classés parmi les monuments historiques.

« La Société, Monsieur le Ministre, connaissant la protection éclairée que vous accordez à tous les intérêts scientifique, ose espérer que vous jugerez digne de votre attention la question qu’elle a l’honneur de vous soumettre. Nos monuments mégalithiques sont, à beaucoup d’égards, les plus importants du monde entier. Ils attirent sans cesse vers la France les savants étrangers. L’archéologie et l’anthropologie préhistoriques en ont fait ressortir toute la signification. Ils éclairent d’une vive lumière toute une grande époque qui précéda les temps historiques et pendant laquelle germèrent sur notre sol les premières semences de la civilisation de l’Occident, et ils méritent d’être protégés contre la destruction aux mêmes titres que les monuments de l’époque historique. Il semble même qu’ils aient droit à une protection plus attentive, car ils forment à eux seuls toute l’histoire des populations qui les ont élevés.

« La Société a pensé que le meilleur moyen de préserver ces restes si intéressants du passé consisterait à confier à une commission spéciale le soin d’en dresser la liste complète et de désigner les monuments mégalithiques qui doivent bénéficier des lois concernant la conservation des monuments historiques.

« Cette commission, chargée d’un travail considérable, urgent et tout spécial, serait en quelques sorte l’auxiliaire de la commission des monuments historiques, à laquelle elle signalerait les monuments à classer, et sur les attributions de laquelle elle n’empièterait pas.

Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de mon profond respect.

Le Secrétaire général : Paul Broca »

Le courrier n’aura pas de suite, et Il faudra attendre un changement de ministre pour que le projet d’Henri Martin aboutisse.


Ce vœu fut transmis à M. Bardoux, ministre de l’instruction publique, par M. le secrétaire général, dans une lettre qui a été publiée dans le procès-verbal de la séance du 19 décembre 1878. Il n’y fut pas donné suite alors. Mais, au mois d’octobre 1879, M. Henri Martin, assistant à une séance de la Commission des monuments historiques, présidée par M. Jules Ferry, ministre de l’instruction publique et des beaux-arts, rappela à ce dernier le vœu émis par la Société et obtint la promesse qu’une sous-commission, chargée de la conservation des monuments mégalithiques et des blocs erratiques, serait rattachée à la commission des monuments historiques. La réalisation de cette promesse ne se fit pas attendre, et le 21 novembre 1879 un arrêté ministériel instituait la sous-commission d’inventaire des monuments mégalithiques et des blocs erratiques de la France et de l’Algérie. »29.

Le 21 novembre 1879 il devient le premier Président de la « Sous-commission d’inventaire des monuments mégalithiques et des blocs erratiques de la France et de l’Algérie » créé à sa demande. Le salut des principaux monuments « celtiques » de la Bretagne est désormais en bonne voie.

Il meurt le 14 décembre 1883. Quatre ans plus tard, le 13 et 14 août 1888, les propriétaires des principaux mégalithes Carnacois, qui n’ont pas trouvé un accord avec l’état, sont expropriés.

En 1879, à la demande d’Henri Martin, Mr Jules Ferry, alors ministre de l’instruction publique et des beaux-arts, créait, sous la présidence de l’illustre historien une commission des monuments mégalithiques à côté de la commission des monuments historiques, et, en 1882, un crédit supplémentaire était accordé par les Chambres pour la conservation de ces grandes reliques du passé. La nouvelle commission, pensant avec raison que le seul moyen vraiment efficace de les sauver pour la France et pour la science, était l’acquisition, réalisa, de 1882 à 1886, dans le Morbihan et principalement à Carnac, tous les marchés amiables dont les conditions n’étaient pas excessives ; mais, dès 1887, les prétentions devenant de plus en plus exagérées, en raison du désir que montrait l’Etat d’acquérir l’ensemble des monuments de Carnac, les négociations durent être abandonnées et il fallut recourir à l’expropriation. Sur un rapport de M. Spuller, M. Jules Grévy signa, le 21 septembre 1887, un décret déclarant d’utilité publique la conservation des monuments mégalithiques de la commune de Carnac. Le jury d’expropriation, réuni les 13 et 14 aout dernier, en fixant les indemnités dues aux propriétaires dépossédés, a rendu l’Etat maitre à Carnac.30

L’année 1889 couronnera son action avec le classement « par liste » au titre des Monuments Historiques de plus de 200 monuments mégalithiques en France : 14 alignements, 83 dolmens et allées couvertes, 95 menhirs et pierres dressées, 4 cromlechs et 8 tumuli. En comparaison, de 1871 à 1888 seuls 7 menhirs et 5 dolmens avaient été classés au total31.

9 – Henri Martin, homme politique et académicien – la postérité


Henri Martin est un Républicain convaincu et courageusement engagé dans l’action politique, c’est parce qu’il a été Maire du XVIe arrondissement de Paris qu’une rue porte son nom.

Au 4 septembre 1870 M. Henri Martin, comme tous, les bons patriotes, abandonna ses travaux pour se consacrer entièrement à la défense du pays. Il fut élu maire du XVIe arrondissement et prit une part active à l’organisation des bataillons de volontaires.

Le 8 février 1871 M. Henri Martin fut nommé représentant de l’Aisne à l’Assemblée nationale ; le 30 janvier 1871 le département de l’Aisne l’élut sénateur. Il a été nommé président du conseil général de l’Aisne dans les sessions de 1880 et 1881.32

Henri Martin est élu membre de l’Académie des Sciences Morales et Politiques le 27 juillet 1871 et de l’Académie Française le 13 juin 1878.


Ce travailleur infatigable, ce grand historien, ce patriote éprouvé, ce vertueux citoyen, ce membre de deux académies, l’Académie des sciences morales et politiques, et l’Académie française, cet homme politique qui a été député dans les jours les plus difficiles, qui est sénateur, président du conseil général de l’Aisne, n’est pas décoré. Il a mieux que cela, il a l’auréole de l’estime et de l’admiration universelles.33

Henri Martin prend froid en sortant d’une séance du Comité des Sciences historiques et meurt le 14 décembre 1883, probablement d’une pneumonie. Il est décidé, en reconnaissance de ses services, de lui faire des obsèques nationales. Sa tombe, modeste et sobre, est toujours visible dans la 14ème section du cimetière du Montparnasse à Paris.

Dans les premiers jours de décembre 1883, une tempête de neige, accompagnée d’un vent glacial tomba subitement sur Paris. Henri Martin, sorti trop légèrement vêtu, s’était rendu à l’une des séances du Comité des sciences historiques, à la Sorbonne. A la sortie de la salle chauffée, il fut saisi par le froid. Deux jours plus tard, il était pris tout à coup le soir d’un frisson très violent et très prolongé. Son fils, le docteur Ch. Martin fut appelé en toute hâte. Dans l’après-midi du 14, il expirait.

La nouvelle de la mort de Henri Martin, répandue, rapidement dans Paris, attrista la fin de cette année 1883, comme la nouvelle de la mort de Gambetta en avait assombri le début. Les Chambres levèrent la séance en signe de deuil, après avoir décidé, sur la proposition du gouvernement, que des obsèques nationales seraient faites à l’historien national.

Henri Martin avait désiré être accompagné par un pasteur protestant libéral ; la famille pria le pasteur Dide de remplir ce vœu du défunt. Les obsèques n’en conservèrent pas moins un caractère civil. Le convoi partit de la mairie de Passy où le Corps avait été transporté, et formé d’une foule immense, où se confondaient les insignes et les bannières, les couronnes et les emblèmes envoyés de tous les coins de la France, il se dirigea lentement par les grandes avenues extérieures, vers le cimetière Montparnasse.35

Le 3 décembre 1885 l’avenue du Trocadéro est débaptisée par décret pour porter son nom. L’adresse de la mairie du XVIéme devient : 71 avenue Henri Martin.

En 1887 parait sa biographie édifiée par Gabriel Hanoteau. L’auteur insiste en conclusion sur les qualités morales de l’homme. C’est une chose que nous avons noté, elle se traduit par exemple par une extrême courtoisie avec ses contradicteurs et opposants. Puisse cette attitude revenir.

« L’Histoire de France sera remplacée tôt ou tard ; la science progresse ; les points de vue se déplacent. Même ce vaste et large exposé du drame national, dû à la plume de Henri Martin, sortira de l’actualité. Il se rangera sur les rayons plus obscurs des bibliothèques pour faire place à d’autres. Mais ce qui ne périra pas, c’est l’influence saine et fortifiante qu’ont eue sur les générations présentes, qu’auront ainsi indéfiniment sur les générations futures, les conseils d’un homme dont la vie a été un exemple.

Il a étendu son amour sur ses amis, sur ses adversaires, — je ne dis pas sur ses ennemis, il n’en n’avait pas un, — sur son pays, sur l’humanité. C’est trop. Il a été un grand cœur, un trop grand cœur. Que cette qualification lui reste et que ce soit avec ce stigmate glorieux que son nom passe à a postérité ».36

Sans tiret, s’il vous plait !

Henri Martin ne fera l’objet que d’une seule biographie et sera largement oublié dès le tournant du 20ème siècle. Seule la version française du jeu de société américain Monopoly, édité par la société Hasbro, rappelle depuis 1946 son nom mais en l’orthographiant avec un tiret incongru.

Henri Martin a été la clef de voute de la politique de protection des monuments mégalithes en France. C’est une personnalité attachante aux multiples facettes et ses motivations sont à son image multiples, archéologiques et historiques bien sûr, mais aussi religieuses et spirituelles, et enfin nationales et politiques. Pour lui, les monuments mégalithiques sont le berceau de la République.

Henri Martin, le maire, le sénateur, le laïc qui rêvait d’une vie après la mort, le druide, l’historien oublié, est devenu immortel en protégeant ces monuments millénaires. Peut-être, qu’un jour, une des communes du projet Unesco trouvera un moyen de rappeler son nom.

Philippe Le Port pour Les Vaisseaux de Pierres

Notes et bibliographie

  1. Bourdon E., 2017. La forge gauloise de la nation. ENS Éditions, 2017, https://doi.org/10.4000/books.enseditions.7895. ↩︎
  2. Pierre et Paul (pseudonyme de Léon Vanier), vers 1882. Les hommes d’aujourd’hui, 4éme volume n° 174, vers 1882. https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1203330r/f707.item ↩︎
  3. Vallet de Virville A., 1855. « Compte rendu de l’Histoire de France Henri Martin 4éme édition », in : Bibliothèque de l’Ecole des Chartes, année 1855, p. 472. https://www.persee.fr/doc/bec_0373-6237_1855_num_16_1_445338 ↩︎
  4. Le Grand prix Gobert est un prix de l’Académie française annuel. Il est remis dans le domaine de l’Histoire depuis 1834 et est destiné à récompenser « le morceau le plus éloquent d’histoire de France, ou celui dont le mérite en approchera le plus ». ↩︎
  5. Pierre et Paul, vers 1882, opus cit. ↩︎
  6. Sandras A., Manfrin F., Lefébure A., 2017. Écrire l’histoire au XIXe siècle. 100 livres d’histoire à (re)découvrir, Paris, BnF, 2017, p. 22. ↩︎
  7. Geslot J.-Ch., 2020. « Un inestimable succès : l’Histoire de France d’Henri Martin et ses publics », in : Revue d’histoire du XIXe siècle, n° 60, 2020 (1), p. 239-255. https://journals.openedition.org/rh19/6937 ↩︎
  8. Couronnée par l’Académie des inscriptions (1844) et l’Académie française (1851 et 1856) ↩︎
  9. Larousse P., 1872. Grand dictionnaire universel du XIXe siècle. Paris : Administration du Grand dictionnaire universel, vol. 8, 1872, p. 746. ↩︎
  10. Martin H., 1855. Histoire de France depuis les temps les plus reculés jusqu’en 1789. Paris, Furne, vol. 1, 1855, p. 1 ↩︎
  11. Michelet J. , 1885. Histoire de France, Paris, A. Lemerre, vol. 1, 1885, p. 166 ↩︎
  12. Pierre et Paul, vers 1882, opus cit. ↩︎ ↩︎
  13. Hanotaux G., 1887. Henri Martin : sa vie, ses œuvres, son temps, p. 215 et 219. https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6507335t/f11.item ↩︎
  14. Hanotaux G., 1887, opus cit. ↩︎
  15. Christophe-Paulin de la Poix, dit chevalier de Fréminville (1787-1848), en tête de file du mouvement, considère que ces pierres vacillantes sont issues de la main de l’homme et font partie d’un ensemble de monuments qui auraient eu « une destination funéraire ». Longtemps perçues comme des ouvrages gaulois « consacrés à un usage divinatoire » (Cayot-Delandre 1847, p. 148) ↩︎
  16. Inventaire des monuments mégalithiques de France. 1880. Page 64, 72 / https://www.persee.fr/doc/bmsap_0301-8644_1880_num_3_1_3290 ↩︎
  17. p. 217-237 ↩︎
  18. En 1867, la Société d’émulation des Côtes-du-Nord organise le premier Congrès international celtique où se pressent en foule des celtistes venus de tous les départements de l’Armorique, de Paris, d’Irlande, d’Écosse et du Pays de Galles. S’alternent chants de bardes et longues discussions scientifiques. Ce congrès est organisé par Charles de Gaulle, l’oncle du général (1837-1880), et placé sous la présidence de Mgr Augustin David, évêque de Saint-Brieuc – lui-même archéologue et collectionneur – et fondateur en 1861 la Société d’émulation d’archéologie et d’histoire. ↩︎
  19. Bertrand A., 1867. « De l’Origine des Monuments mégalithiques, Opinion de Mr Henri Martin, par Alexandre Bertrand », in : Revue Archéologique , vol. 16 (juillet à décembre 1867), p. 377-396. ↩︎
  20. Retranscription partielle de cette note : « Débat entre nous- Développement de l’archéologie –on se rapproche de l’histoire – A quoi cela arrive – comparaison de ses résultats et de nos idées antérieures – on se rapproche / Théorie de A.Thierry – Les deux branches Celtiques – On se rejoint donc – les Gaëls et les Cymrys / Conclusion de Mr Bertrand – La civilisation mégalithique – La civilisation gauloise postérieure – Il les reconnait liés ensemble, en conséquence Celtiques / Thierry : Succession de deux sociétés, le 1er Religieux Théocratique, le 2éme Héroïque. Le 1er les Druides. Le 2éme les Chevaliers. / Bertrand : Succession d’une société signalée par les grands monuments religieux, d’une société qui n’a plus ces grands monuments et dont les tombes ont le caractère guerrier. On se rejoint. Mes propres observations en Irlande » ↩︎
  21. Retranscription : 26 Juillet 1874, Mon cher Mangin/ Mes observations se bornent à ceci : 1-La race des Dieux de Dana (Irlande). 2- L’âge de la pierre polie et l’époque mégalithique se confondent dans les Gaules. La pierre polie domine dans l’époque mégalithique qui a dû être longue, mais les métaux17 commencent d’y apparaitre. Bien à vous H. Martin » ↩︎
  22. Retranscription : « Mon cher Mangin. Je n’ai pas voulu dire l’autre jour que la civilisation des premiers celtes égalait en général les splendides civilisations artistes de l’Egypte et de l’Assyrie… mais …que pour transporter, ériger, orienter, disposer dans un ordre régulier les masses énormes de leur monuments bruts, il leur aurait fallu des notions scientifiques analogues à celles des Egyptiens et des Assyriens. Bien à vous. H. Martin » » ↩︎
  23. https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9766156r.texteImage ↩︎
  24. Parmi les journaux illustrés du 19ème siècle, on peut citer : Le Monde Illustré (1857-1956), Le Musée des Familles (1833-1900), Le Magasin Pittoresque (1833-1938) ou La Science pour Tous (1855- 1909) ↩︎
  25. https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k96754197.texteImage ↩︎
  26. Martin H. 1872, Études d’archéologie celtique : notes de voyages dans les pays celtiques et scandinaves, Paris, Didier, 1872, p. IV. ↩︎
  27. Edward Williams, plus connu sous son nom bardique Iolo Morganw (1747-1826) poète et antiquaire gallois. D’abord considéré comme un expert de la littérature galloise médiévale est considéré comme un faussaire, fabriquant de nombreux manuscrits médiévaux. https://www.persee.fr/doc/ecelt_0373-1928_1959_num_8_2_1328_t1_0479_0000_2 ↩︎
  28. https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/cb34374610t/date ↩︎
  29. Inventaire des monuments mégalithiques de France. 1880 (opus cit.) ↩︎
  30. L’Illustration, 8 Septembre 1888 ↩︎
  31. https://fr.wikipedia.org/wiki/Cat%C3%A9gorie:Monument_historique_class%C3%A9_en_1889 ↩︎
  32. Pierre et Paul (pseudonyme de Léon Vanier), vers 1882 (opus cit.) ↩︎
  33. Pierre et Paul (pseudonyme de Léon Vanier), vers 1882 (opus cit.) ↩︎
  34. https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1203330r/f707.item ↩︎
  35. Hanotaux G., 1887, opus cit. ↩︎
  36. Hanotaux G., 1887, opus cit. ↩︎

Pour citer cet article : Le Port P., 2024. « Henri Martin (1810-1883). Historien, homme politique et protecteur des mégalithes », in : Les Vaisseaux de Pierres. Exploration des imaginaires autour et sur les mégalithes de Carnac et d’ailleurs, mis en ligne le 21 septembre 2024.- https://lesvaisseauxdepierres-carnac.fr/, consulté le : …

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